Jour de Fête
Hier c’était fête dans une rue adjacente à la mienne. L’invitation, posée dans la boite aux lettres il y a quelques semaines déjà précisait d’amener le pique nique, les boules de pétanque, la bonne humeur et des chaises.
Lendemain de kermesse d’école, les parents fatigués avaient toutefois installé la grande tonnelle tout contre la grange de Laurent, les tables en plastique blanc s’étaient vues recouvrir de restes de nappes en papier de la veille, toujours la kermesse.
Vers midi, tous les voisins sont arrivés. Les glacières, les shorts et sandales en mousse étaient de sortie. Le lavoir a vite été rempli de bouteilles en tout genre, vite rafraichies par le glouglou des sources.
La rue a résonné de rires, les enfants ont couru partout… Les plats de charcuterie, pain maison, cakes salés et quiches froides se sont passés de main en main, le verre en plastique rempli de rosé toujours à portée. On a fini par s’asseoir, après avoir fait connaissance « vous êtes où ? » « alors nous, c’est la maison à côté de… »
On a partagé les salades de tomate, encensé la recette de Dominique, fait passer les plateaux de fromage, disputé mollement les enfants, en sous vêtements, qui s’éclaboussaient un peu trop dans le lavoir…
Laurent devait faner. C’est dimanche mais les champs n’attendent pas. Il a quitté la table, suivi par quelques autres … Tous sont partis en camion sous les saluts, 100 bottes à ramasser, ça ira vite. Ils seront rentrés pour la fin de la pétanque.
La pétanque, tiens, s’organise dans la cour chez Nicole. Le vieux portail en fer est tellement rouillé qu’il reste éternellement ouvert. Les chiens font la sieste et ne sont dérangés que par le bruit sec des boules tapant l’une contre l’autre. Les enfants ont investi les jardins environnants, allant d’un tracteur au portique, passant du bac à sable au lavoir. Pour remplir les pistolets à eau.
On ne fera pas la sieste, aujourd’hui.
Après une goutte de gnole « bien fruitée, hein », on range un peu.
Les voila mes voisins. Simples, rigolards, des gens que je croise chaque jour dans la rue. Je tente de rattacher les enfants aux parents présents, identifier qui habite ou et qui est le frère de qui. On se tutoie, on rit un peu fort. Pas de chichi avec ces gens là, ils sont ici comme ils seront en vacances, ou plutôt en « vaquinces » comme on prononce ici. Pardonnez la transcription, je n’arrive pas à trouver une orthographe correspondant à la prononciation.
Laurent rentre des foins, les gars qui l’accompagnaient sont torse nu et plein de brins de paille. Ca gratte, c’est sur. Ca ressemble à un paysage d’avant-guerre ou presque, ces banquets campagnards. J’ai beau savoir que ça existe ailleurs, je suis très heureuse d’en avoir un, ici chez moi, et d’y assister. Même si on me traite de bourgeoise avec ma vaisselle en porcelaine et mon rosé dans mon verre à pied.