Ile verte
Voyage très local que celui d'aujourd'hui, dans un petit morceau de ville, appendice étrange à quelques pas du brouhaha du centre névralgique, là où tout se décide, où tout s'achète et se vend, où passent les trams et les voitures, impatientes d'en découdre avec le bitume et les pavés dès que le feu passe au vert.
Oui aujourd'hui, à quelques pas du monde contemporain, du monde des humains connectés, je flâne entre ces quelques rues oubliées ou presque de l'homme. Maisons individuelles cossues datant du début d'un siècle désormais éteint, jardins broussailleux tendance anglais, ou les rosiers ploient près des chaises de jardin, sagement rangées en attendant la fin de l'orage.
Bout de quartier perdu, ou les rues sont si petites et si intimes qu'on violerait presque le cocon de ses habitants à parcourir le trottoir. Les habitants justement, gardiens précieux d'une grâce perdue, ont vieilli au rythme de leurs rosiers et de leurs vérandas, connaissent le chant des oiseaux depuis des décennies, avancent à petit pas, qui vers la Poste, qui vers l'épicerie à quelques rues de leur monde anachronique, leur caddie écossais suivant docilement leur chemin.
Dernier bastion secret d'un temps révolu, adossé à la montagne, au bout d'un cul de sac discret, ces quelques rues de l'Ile Verte déclinent leur poésie surrannée à chacun de mes passages, et je souris intérieurement en volant ces quelques images derrière les grilles des portails en pensant que j'aurai sans doute aimé m'installer ici, aussi.